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Christoblog

Vincent n'a pas d'écaille

Difficile de parler longuement de ce film qui est tout en ellipse, en litote et en évitement.

Alors, tentons l'impossible : Vincent se voit doté de super-pouvoirs quand il est mouillé. Trempé dans l'eau, il devient un dauphin sous amphét, un hydroglisseur en mode perceuse à percussion. Voilà.

Le film est muet - ou presque - et nous fait découvrir ce monde inquiétant et novateur dans un cadre et avec un style qui rappelle l'ambiance de L'inconnu du lac. Vincent est un monstre, il est hors de la société. Une rencontre amoureuse, une amitié contrariée vont rompre l'équilibre précaire de sa survie parmi les hommes.

Le film de Thomas Salvador donne à voir le plus (effets spéciaux mécaniques et non numériques) et le moins (une goutte d'eau sur la main peut-elle renverser la situation ?). C'est à la fois attendrissant et bizarre.

A défaut d'être complètement renversant, Vincent n'a pas d'écaille est intrigant, beau et intéressant. Il aurait fait un magnifique moyen-métrage. Sur la durée (1h18), il peine un tout petit peu à tenir le rythme.

Un objet remarquable et remarqué.

 

2e

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Kingsman

En matière de divertissement pur, difficile d'imaginer plus jouissif et plus décontracté que ce premier Kingsman.

Le film ressemble à ces vieux James Bond dans lesquels ce dernier était vraiment anglais, et ne s'était pas encore nolanisé.

Prenez d'abord un scénario malin (et à tiroir) : comment devient-on agent secret ?

Ajoutez des acteurs au top de leur caricature : un Colin Firth plus précieux que jamais, un Samuel L. Jackson zozotant et dégingandé, des seconds rôles parfaits. Tout cela dans un bain d'élégance british.

Secouez au shaker d'une idée ou allusion par minute (le JB de James Bond, Jason Bourne, Jack Bauer par exemple). Fignolez le tout en ajoutant une bande-son entraînante, des décors parfaits et des scènes cultes (l'église !!), des rebondissements incessants : vous obtenez un pur plaisir de spectateur. 

Enfin, le voici le film dans lequel : le héros peut mourir au débotté après avoir trucidé gratuitement plusieurs dizaines d'innocents, un autre héros peut recouvrer un surcroit d'énergie à la perspective de sodomiser une princesse scandinave, des méchants voient leur chef exploser en feu d'artifice, on boit un cognac napoléonnien en l'honneur d'un mort.

Un festival d'intelligence créatrice comme je n'en n'avais pas vu depuis longtemps !

 

3e

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American sniper

Il faut probablement, pour apprécier un tant soit peu le dernier film d'Eastwood, accepter l'a priori suivant : le film est tiré d'une autobiographie de soldat héroïque.

Il est donc vain de lui reprocher ses aspects patriotiques à l'extrême (ceux qui doutent du bien-fondé de la guerre sont expédiés au second plan, manu militari), ou sa bienveillance complaisante vis à vis du héros (il ne se trompe jamais, et choisit le bon enfant à tuer).

Une fois posé cet état de fait qui désamorce la plupart des polémiques concernant American Sniper, que reste-t-il ? Un film de guerre lambda comme on en a vu tant, mois palpitant que Zero dark thirty, moins réaliste que Démineurs, moins intéressant que des films méconnus sur l'Iraq comme Battle for Haditha ou Dans la vallée d'Ellah.

Eastwood est un cinéaste classique, et sa façon de faire des films est tellement prévisible que cela en devient risible, comme lorsqu'on suit cette balle qui part dans Sadr City pour tuer à plus de 1600 mètres. C'est du solide, du déjà vu, du vieillot. 

Le film n'est donc pas désagréable à regarder, au contraire, les scènes de guerre étant réalistes au possible. Faut-il aller le voir ? Probablement non, sauf à tenir absolument à ne pas être surpris.

 

2e

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Réalité

Une petite fille nommée Réalité veut regarder la cassette vidéo (VHS !) que son père à trouvé dans les viscères d'un sanglier qu'il vient d'abattre. Un loser convainc son ami producteur de financer son film, à condition d'enregistrer le plus beau gémissement de l'histoire du cinéma. Un présentateur télé revêtu d'un costume de rat est persuadé d'avoir un terrible eczéma, qui s'avère être à l'intérieur.  

Si ces pitchs ne vous accrochent pas, vous serez certainement peu sensible à Réalité, la dernière fantaisie de Quentin Dupieux, objet aussi inclassable que les précédents opus de celui qu'on appelle Mr. Oizo, quand il pratique la musique électro plutôt que le cinéma.

Dans une Los Angeles à la fois luxueuse et désertique, Alain Chabat promène sa nonchalance tranquille avec une grande classe, jouant la lucidité perdue dans un océan de délire inquiétant. On pense évidemment souvent au réalisateur de Twin peaks, et plus particulièrement à Mulholand Drive. C'est à la fois l'horizon et la limite du film : ses rêves intriqués et ses dialogues absurdes évoquent systématiquement l'oeuvre de David Lynch, sans jamais parvenir à l'égaler, ni même à l'approcher.

Malgré ses réserves, Réalité est sans conteste le meilleur film de Quentin Dupieux à ce jour. Intrigant et séduisant dans toute sa première partie, il patine dans la deuxième et semble ne pas savoir comment se terminer. La chute est à l'image de cette deuxième partie : ratée si on n'a pas aimé, ouverte si on veut être gentil.

A vous de voir.

 

2e

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Spartacus et Cassandra

Ce documentaire de Ioannis Nuguet fut sans conteste un des must de la sélection ACID à Cannes 2014. 

Difficile de résumer à froid le brûlot émotionnel qu'est ce court film (1h et 20 minutes) : premier témoignage de la vie des Roms au cinéma ? reportage brûlant et indécent sur l'absence de parents inconséquents ? conte moderne en forme de Hansel et Gretel lost in the 93 ?

Spartacus et Cassandra erre constamment entre plusieurs genres (drame familial, essai auteuriste, documentaire réaliste) et plusieurs styles (réalisme magique, naturalisme bobo, documentaire sec). 

Ses limites sont à la fois ses atouts. Le film est souvent à la limite de l'indécence, flirte avec le mauvais goût, mais parvient (presque) toujours à échapper aux chausse-trappes. Un beau moment, servi par la puissance magnifique de la jeune Cassandra Dumitru, force rutilante et solaire, merveille de résilience triomphante, la cicatrice au coin des lèvres.

 

3e

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Mon fils

Eran Riklis (Les citronniers, Le voyage du directeur des ressources humaines) est un réalisateur que j'aime beaucoup. Ses films sont parfois dénigrés par la presse un peu snob (dernier exemple fourni par les Inrocks à propos de Mon fils), mais je trouve pour ma part qu'il est l'exemple type du bon artisan : il fait des films qui sont pensés pour intriguer et intéresser les spectateurs.

Mon fils remplit une fois de plus son rôle en dressant le tableau touchant et complexe d'un israélien arabe surdoué, Iyad. Ce dernier est envoyé dans un lycée très coté dans lequel il n'y a quasiment que des juifs. Bien entendu, après une période d'adaptation, le personnage principal se fait principalement des amis juifs. Les circonstances de la vie vont progressivement l'amener à faire des choix cornéliens...

En choisissant de quitter les chemins rabattus du conflit entre communautés, Eran Riklis fait un choix audacieux et payant. Le tableau qu'il dresse de l'évolution de son personnage au fil des années (le film s'étire sur une décennie) est sensible et complexe. Les acteurs et actrices y sont tous formidables, et la mise en scène, quoique sage, n'en est pas moins très efficace.

Sous ses abords proprets et doucereux, Mon fils s'avère bien plus complexe qu'il ne parait au premier abord. Malgré quelques imperfections, il mérite vraiment d'être vu et confirme l'excellente forme du cinéma israélien.

 

3e

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Les merveilles

Si je faisais un concours des films qui m'ont le plus ennuyé, Les merveilles disposerait de sérieux atouts.

D'abord, je l'avoue, j'ai dormi durant sa projection à Cannes. Alors, allez-vous me dire, de quel droit puis-je juger le film ? Mais à l'inverse, le film ne m'a-t-il pas lui-même anesthésié, sachant que même à Cannes, je m'endors rarement ?

J'ai dormi. Mais pour mon excuse, on voit des gens dormir dans Les merveilles. On voit aussi des gens manger, et participer à une émission de télé. On voit aussi (il me semble) des abeilles et Monica Belluci en animatrice égyptienne. Mais je n'en suis pas certain, tant le projet d'ensemble m'a échappé.

Le grain de l'image est très moche. Je me souviens avoir pensé que je voyais les films super 8 d'une lointaine tante italienne un peu défoncée, en ne comprenant rien à ce que je voyais : des phares dans la nuit, un trampoline, des artisans charcutiers.

Il y avait peut-être un sens à toutes ces images projetées vers moi. Mais lequel, je ne sais pas trop : au milieu de ma torpeur n'a surnagé qu'un inénarrable ennui, baigné dans un océan d'incompréhension ensommeillée.

Bonne nuit.

  

1e

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It follows

Difficile de comprendre l'engouement incroyable de la critique pour cette petite série B, certes très bien réalisée, mais fort peu originale.

Vous avez sûrement entendu parler de l'intrigue. Une jeune fille couche avec un garçon, et à partir de ce moment, il y a toujours une sorte de zombie qui cherche à la tuer, sauf si elle couche avec un autre garçon, auquel cas elle refile la malédiction au malheureux partenaire. Et si ce dernier est zigouillé avant d'avoir couché, les méchants zombies (que seules les victimes voient, évidemment) remontent d'un cran dans cette macabre chaîne de Saint-Antoine, pour s'attaquer au maillon précédent.

On voit donc immédiatement toute la subtilité du truc : sexe=mort, sexe=transmission du mal.

Le début du film est assez sympa. La mise en scène cotonneuse de David Robert Mitchell est inquiétante juste comme il faut, même si le tableau de cette Amérique pavillonaire désertée par les adultes a déjà été souvent montrée.

Les choses se gâtent quand la mort en marche est montrée à l'écran. A partir de ce moment, le film ne se distingue pas vraiment d'un autre film de zombie / slasher : même ralentis expressifs, même effets de surprises lourdingues, même teint cadavérique chez les agresseurs, même bande-son inquiétante... J'ai franchement eu l'impression d'avoir vu ce type de scènes mille fois : l'agresseur rôde, il fait un trou dans le mur, tout le monde hurle, et .... c'est un copain qui passe la tête par le trou ! Quelle surprise et quels frissons ! Damned, on a eu vachement peur !

Le ridicule du film atteint son paroxysme dans une scène de piscine dans laquelle tous les stéréotypes du film d'horreur semble réunis : bâtiment inquiétant (limite hanté, tu vois), orage opportun, idée stupide (on jette des sèche-cheveux dans l'eau pour tuer un mort-vivant), trucages approximatifs (on ne voit jamais l'empreinte du corps se dessiner dans l'eau), et tic auteuriste (le nuage de sang façon Kubrick).

Le film n'apporte donc pas grand-chose au genre, si ce n'est une mise en scène assez élégante, un pitch rigolo et une atmosphère particulière. On est très loin de la perfection visuelle et de l'originalité d'un Morse, par exemple.

A réserver donc au fan de "la mère qui se transforme en nymphomane hystérique en zigouillant son fils", ou à celui qui kiffe "les hommes invisibles qu'on repère en jetant une serviette dessus".

 

2e

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Imitation game

Dans le genre biopic sage et appliqué, difficile de faire plus intéressant.

D'abord la personnalité d'Alan Turing, mathématicien hors pair vaguement autiste, homosexuel et marathonien, est captivante.

Son histoire (il sauve des millions de personnes en décryptant les codes secrets allemands) est fascinante. 

Enfin, le réalisateur norvégien Morten Tyldum réalise son film correctement, en s'appuyant sur une sobriété plutôt élégante, au service d'une narration intéressante mélangeant hardiment (pour ce type de film...) trois époques différentes.

La soirée passée en compagnie de Benedict Cumberbatch (excellent), Keira Knightley (parfaite) et des très bons seconds rôles s'avère donc agréable, honorable et instructive.

Je cherche un peu en vain les raisons qui m'empêchent de mettre une note plus élevée au film : une petite déception que les aspects mathématiques soient si superficiellement survolés ? une impression que le contexte historique est un peu sacrifié au profit du spectaculaire (le cassage d'Enigma ne semble pas s'être déroulé d'une façon aussi limpide que le montre le film, le test de Turing est mal expliqué, il est peu probable que Turing ait décidé de qui allait vivre ou qui allait mourir) ? un léger manque de noirceur et/ou de profondeur ?

Pas un grand moment de cinéma, mais un bon moment de détente intelligente.

 

2e

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Phoenix

Mêmes qualités et même défauts dans ce film que dans Barbara, le film précédent de Christian Petzold. 

Le début est intrigant, instillant cette délicieuse incertitude qui fait le sel du bon cinéma : on ne comprend pas exactement ce qu'on voit, et on attend le plan suivant avec impatience. Ce brillant début se situe exactement à mi-chemin du Hitchcock de Vertigo et de Fassbinder.

Malheureusement, comme dans Barbara, le film finit par ployer sous le poids trop lourd de son formalisme forcené. Le scénario devient peu crédible (pour ma part je n'ai jamais vraiment adhéré à la situation : je ne crois pas qu'on puisse ne pas reconnaître quelqu'un à travers sa voix, son regard, sa démarche). 

J'ai donc décroché du film dans sa deuxième partie. Tout me semblait factice, décors de carton pâte, jeu artificiellement composé des acteurs, péripéties commandées et costumes amidonnés. Raté.

 

2e

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