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Christoblog

Articles avec #tilda swinton

Trois mille ans à t'attendre

Le goût du merveilleux au cinéma ne fait plus recette.

Il est d'autant plus intéressant de voir le patriarche George Miller proposer une relecture des Mille et une nuits arrangée à la sauce moderne : le génie Idriss Elba est confronté à des problématiques qu'on comprend parfaitement (se rendre utile, socialiser, ne pas passer quelques milliers d'années sans activité !) et Tilda Swinton, égale à elle-même (c'est à dire intelligente), en narratologiste.

Alors, bien sûr, le scénario est fait de bric (des resucées de classiques) et de broc (des inventions souvent inspirées, comme celle des instruments de musique du roi Salomon), mais au final, le savoir-faire de sieur Miller emporte le morceau : le film se laisse regarder avec gourmandise, et pour peu qu'on ait gardé son âme d'enfant, il est même parfois régressivement jouissif. La mise en scène imaginative et le montage nerveux y sont pour beaucoup.

Un film de divertissement de bonne qualité, ode à l'altérité, qui nous change de la soupe insipide servie par les usines à super-héros.

George Miller sur Christoblog : Mad Max : Fury road - 2015 (**)

 

2e

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The souvenir - Part II

J'ai dit tout le mal que je pensais de l'épisode I dans un article précédent

Force est de constater que ce deuxième opus évite les principaux écueils de son prédécesseur. Il est moins poseur, moins apprêté et globalement plus émouvant.

Le sujet du film se prête à cette simplification : il s'agit de montrer l'héroïne de l'épisode précédent en train de tourner un film sur l'histoire d'amour toxique qu'elle a vécu. Les évènements sont donc moins déjantés et l'émotion plus palpable.

On est plus enclin à s'attacher à la personnalité de Julie et à son approche sensible du travail de deuil. Les rencontres avec sa mère et avec les parents d'Anthony sont particulièrement touchantes.

Toutefois, je ne peux m'empêcher de trouver le projet de la réalisatrice un peu léger et nombriliste, à l'image de cette longue séquence onirique ou de ce dernier plan sous forme de mise en abîme élégante, mais sans beaucoup de sens.

Joanna Hogg sur Christoblog : The souvenir - Part I - 2022 (*) 

 

2e

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The souvenir - Part I

Quel film froid et compassé que celui-ci !

Joanna Hogg nous propose un condensé de cinéma d'auteur prétentieux : auto-portrait en creux, rythme indolent, longueurs inutiles, images dans le film illustrant le film en devenir du personnage / réalisatrice, intérêt dramatique inexistant, confusion volontaire de la réalité et des songes, cadres savants mais dépourvus de sens, regards caméras sur-signifiants, photographie éteinte, plans fixes sur la nature accompagnés d'une voix off pontifiante, temporalité bousculée, ruptures de ton incessantes, etc.

Difficile d'imaginer un cinéma plus intellectuel, plus poseur et moins sensuel : on est quelque part entre Chris Maker et Kelly Reichardt, mais sur un mode "film de fin d'étude" bricolé dans sa chambre d'étudiante.

C'est peu dire qu'on se contrefout de cette histoire d'amour à la sensualité de hareng saur, et à laquelle on ne croit pas un seul instant.

L'actrice principale, Honor Swinton-Byrne, tourne aux côtés de sa maman, Tilda Swinton. Les deux ne sont pas mauvaises, mais ne sont pas aidées par le charisme d'épagneul breton de l'acteur Tom Burke.

Une expérience de la fadeur la plus extrême, qui ne m'encourage pas à aller voir la deuxième partie.

 

1e

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Memoria

Memoria est sûrement le film le plus abordable de son auteur, Apichatpong Weerasethakul.

Il possède d'abord une intrigue à peu près digne de ce nom : une scientifique entend parfois un bruit mystérieux, une sorte de bang, qu'elle seule semble percevoir. Elle va chercher à percer ce mystère.

L'histoire se développe cahin-caha, à coup de tentative d'explications scientifiques (un peu) et de quête mystique (beaucoup). Le personnage principal rencontre une sorte de médium, qui l'aide à franchir les frontières entre notre monde réel et celui d'où provient le bruit (il est le disque dur, elle est l'antenne, dit une des réparties du film).Tilda Swinton sert parfaitement le cinéma du Thaïlandais, étirant sa longue carcasse dans des villes et des paysages sud-américains magnifiquement filmés, comme toujours.

Le film est donc une longue rêverie déambulatoire au charme persistant. Il offre des scènes saisissantes, dont celle qui fournit au final l'origine du bruit entendu, d'une beauté à pleurer. Le moindre coin de rue est magnifié par la caméra du cinéaste palmé : c'est probablement ce qui se fait de plus beau d'un point de vue formel dans le cinéma contemporain.

Attention, on est tout de même chez Weerasethakul, donc mieux vaut être préparé et bien réveillé, car les plans sont longs et souvent fixes, les dialogues épars et le propos globalement assez abscons.

La meilleure introduction pour qui souhaiterait découvrir le cinéma de "Joe".

Apichatpong Weerasethakul sur Christoblog : Tropical malady - 2004 (***) / Oncle Boonmee - 2010 (*) / Cemetery of splendor - 2015 (**)

 

3e

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The French Dispatch

A force de faire des films avec un rapporteur et un compas, Wes Anderson finit par oublier  que le cinéma est avant tout histoire de sensations.

Dans ce film manifeste qui se veut d'une certaine façon le couronnement d'une "méthode", le cinéaste américain multiplie les vignettes, d'une qualité inégale.

La première des trois histoires est assez plaisante, grâce à Léa Seydoux, Del Toro et Brody. La seconde est faible : je n'y ai vraiment rien trouvé d'intéressant et Lyna Khoudri n'est malheureusement pas à sa place, au milieu du casting le plus prestigieux qu'on ait peut-être jamais vu. Quant au troisième récit, il concentre le pire de ce qu'on peut reprocher au film : les procédés de Wes Anderson y deviennent des recettes éculées, servies par un style compassé, qui peut encore toutefois faire mouche. 

Trop d'idées, trop de plans, trop d'infos dans chaque plan, trop de détails, trop de langues, trop d'intentions, trop de caricatures. Et pas assez d'émotions. Le contraste avec le film précédent d'Anderson, L'île aux chiens, exigeant, simple et sombre, est frappant.

Wes Anderson sur Christoblog : La vie aquatique - 2003 (*) / A bord du Darjeeling Limited - 2007 (***) / Fantastic Mr. Fox - 2009 (****) / Moonrise kingdom - 2012 (****) / The grand Budapest hotel - 2013 (**)  / L'île aux chiens - 2018 (****)

 

2e

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La voix humaine

Pas facile de parler de cet objet curieux que j'ai du mal à appréhender : à peine plus qu'une publicité pour Nespresso, un peu moins qu'un moyen métrage, La voix humaine résiste à la catégorisation.

Le mieux est peut-être de l'envisager comme une dette vis à vis du temps qui passe : on se souvient que dans Femmes aux bord de la crise de nerf, il était déjà question de mettre en scène cette pièce de Cocteau. Ou peut-être comme une sorte de manifesto : moi, Almodovar, esthète devant l'éternel, je vais jouer avec les couleurs (je milite pour la création du rouge Almodovar), la réversibilité des décors, le sens du rythme et le choix des accessoires, l'utilisation judicieuse de la musique, la beauté insondable des vêtements, autant de sujets que je maîtrise et que j'aime.

Dernière option possible : le film est le compte-rendu de la rencontre d'Almodovar entomologue et de la mante religieuse Tilda Swinton, l'actrice qui ne perd jamais une occasion de tourner avec les plus grands.

Le résultat ne m'a pas réellement enthousiasmé, même s'il me faut admettre qu'il est admirable par certains aspects. La voix humaine est au pire une curiosité de cinéphile, au mieux une friandise pour les fans. Le contenu narratif de l'oeuvre est égal à son pitch, tout l'intérêt réside donc dans sa forme, almodovarienne en diable, sans déchet, sans graisse, mais aussi curieusement sans beaucoup de goût.

A vous de voir.

 

2e

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The dead don't die

Quelle mouche à bien pu piquer Jim Jarmusch de se lancer dans un projet qui mêle film de zombie, comédie froidement décalée, critique de la société de consommation et film à message politique ?

De cet assemblage hétéroclite ne ressortent que très peu de points positifs : une galerie de portraits-vignettes plutôt réussis dans la première partie du film, un Bill Murray au sommet de son art, certaines scènes joliment menées et une ambiance cohérente qui pourrait évoquer un Twin Peaks de peinture naïve.

Le film accumule par ailleurs toute une série de défauts dont le principal est le scénario, absolument catastrophique : il sacrifie le développement de certains personnages (les jeunes du Centre par exemple), accumule les pirouettes gênantes (les personnages qui connaissent le script comme dans un mauvais Blier) et les situations sans queue ni tête (le personnage joué par Tilda Swinton).

Au final, The dead don't die apparaît plus comme une succession de scènes tournées au bénéfice de copains / acteurs qu'une oeuvre pensée dans sa globalité. Si le résultat n'est pas totalement méprisable, c'est parce qu'il y a dans la caméra de Jarmusch une délicatesse qui parvient parfois à faire mouche. De justesse.

 

2e

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Okja

Okja ne sortira pas en salle, et c'est bien triste. Pour ceux qui, comme moi, pensent que le média cinéma ne peut se concevoir sans l'expérience du collectif, du grand écran et de l'extérieur, la nouveauté n'est pas plaisante.

On peut penser que les réalisateurs qui se dirigeront vers Netflix comprendront progressivement que leur propre intérêt n'est pas de travailler à la mort de leur activité : Bong Joon-ho affirme que Netflix lui a laissé toute liberté pour réaliser son film, mais quel intérêt si le grand public n'a pas accès à Okja ?   

Heureusement, je suis persuadé que le modèle Netflix n'est pas destiné à triompher : son audience se rendra finalement compte qu'elle est prisonnière, l'effet de mode passera et les auteurs ne se priveront pas aussi facilement de la reconnaissance associée à une sortie en salle (ainsi que d'une sélection au Festival de Cannes, par exemple, pour les plus talentueux d'entre eux). 

Mais revenons au film. Le dernier opus de Bong Joon-ho est à la limite du film pour enfant. Le début de Okja, dans la forêt coréenne, est très réussie : images époustouflantes, travail hyper réaliste et réussite totale de la première scène d'action le long de la falaise. Le second degré à la sauce coréenne (avec une bonne dose d'auto-dérision) est manié à la perfection par le réalisateur, même si ce n'est pas toujours très fin. La façon dont la mode des selfies est croquée est délicieuse.

L'attaque par les terroristes écolos très politiquement corrects est à mourir de rire. Elle marque, avec la course poursuite remarquable dans le supermarché, l'apogée du film, qui dans sa deuxième partie perd petit à petit en consistance.

Comme si souvent pour les cinéastes du monde, le talent du coréen semble se diluer dans le mauvais goût et les conventions une fois qu'il s'exerce aux USA. Même si Tilda Swinton et le reste du casting fait de son mieux (à l'exception notable de Jake Gyllenhaal qui signe ici sa pire prestation), le film ronronne tout à coup. Les scènes coréennes donnaient l'impression d'être ouvertes sur la ville, celles de New York semblent enfermées dans une sorte de cour miniature sclérosante.

Je résume. Deux films dans Okja : le premier coréen, très bon, le second américain, médiocre.

 

2e

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The grand Budapest hotel

J'aime autant le dire en introduction : je suis très partagé quant aux films de Wes Anderson. J'ai adoré Mr. Fox, mais détesté La vie aquatique. J'ai été profondément ému par le début de Moonrise Kingdom, mais une partie d'A bord du Darjeeling limited m'a vraiment énervé. Etc. 

Mon ressenti après la projection de The grand Budapest hotel est une fois de plus très contrasté. L'univers imaginaire d'Europe Centrale (façon Syldavie, on pense souvent à Tintin) est d'abord très impressionnant : parfaitement kitsch, trop sucré et en même temps suprêmement décati. Du grand art en matière de décors, costumes, éclairages. Puis il devient de plus en plus lourd, (presque) jusqu'à conduire à l'indigestion.

Certaines scènes sont délicieusement menées (l'évasion de prison, dans le genre "une idée par plan"), et d'autres accusent de sérieuses baisses de régime. Certains acteurs sont magnifiques (Ralph Fiennes, Edward Norton), et d'autres sont transparents (Mathieu Amalric, Adrien Brody).

J'ai été souvent estomaqué par la maestria et l'invention de Wes Anderson réalisateur et dialoguiste (les détails innombrables, les cadrages au millimètre, des enchaînements magnifiques, les réparties parfois cinglantes, les noms délicieusement inventifs) et catastrophé par l'anémie de Wes Anderson scénariste (le film tourne un peu à vide de ce côté-là).

Mon avis est tout de même positif, car le film fait passer un bon moment, et il faut bien reconnaître que le foisonnement d'idées qu'il propose est souvent jouissif.

Wes Anderson sur Christoblog : Moonrise kingdomLa vie aquatique / A bord du Darjeeling limited / Fantastic Mr. Fox

 

2e 

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Only lovers left alive

Le dernier Jarmusch est une merveille de poésie. Tanger et Detroit, belles et décrépites, filmées superbement, constituent l'atout majeur du film.

Tilda Swinton donne l'impression irrésistible d'être un véritable vampire (mais peut-être l'est-elle ?) et Tom Hiddleston est radicalement magnétique.

Le scénario du film est quant à lui quelconque. Je peine d'ailleurs à m'en souvenir, tellement l'intérêt de Only lovers left alive réside ailleurs : dans son aspect de gaze vaporeuse striée de riffs de guitare et de visions hallucinées. Jarmusch parvient à la fois à respecter les codes du genre (le Let me in, les balles en bois, la vitesse d'exécution, l'omniscience quant à l'âge des objets) et à les transfigurer comme si on les voyait pour la première fois.

Only lovers left alive respire la nostalgie du futur, évolue dans une sorte de ralenti qui préfigure la fin d'un monde, distille un spleen cotonneux et feutré. Les décors sont somptueux, la mise en scène est au cordeau. Les clins d'oeil sont charmants (Marlowe, Einstein, "Et aussi l'ail tant que vous y êtes", la maison de Jack White et un concert de Yasmine Hamdan).

Un plaisir d'esthète, une friandise pour gourmet.

 

3e 

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Snowpiercer, le transperceneige

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/360/21036090_20130904151243628.jpgAutant le dire tout de suite, j'ai été très déçu par le passage à la production internationale de mon réalisateur coréen fétiche, Bong Joon Ho.

Même si fugitivement affleurent dans le film ses anciennes qualités (second degré, attention aux visages, sens inné de la mise en scène), la vérité est que ce sont surtout les défauts du film dont on se souvient. A savoir : un casting fadasse et hétéroclite, des clichés vus et revus mille fois (pauvres/gentils contre riches/méchants), des rebondissements invraisemblables, des décors moches et terriblement factices, des combats filmés caméra à l'épaule dans la plus grande confusion.

Si le film commence honorablement, il devient de plus en plus artificiel, pour finir en queue de poisson désastreuse. Attention, spoiler à suivre. Rien à sauver dans les dix dernières minutes : la machine en tête de train ne ressemble à rien, l'enfant qui entre dedans ne correspond à aucun enchaînement narratif, le dernier plan sur l'ours polaire est d'une naïveté confondante (et en plus n'a rien à voir avec l'histoire).

A aucun moment Bong Jooh Ho ne parvient à créer une atmosphère réaliste au sein de son film, comme il l'avait superbement réussi dans The host. On ne rentre jamais dans cette histoire, en particulier parce que les acteurs ont le charisme d'une huitre (le taiseux Chris Evans), ou en fond au contraire des tonnes (Tilda Swinton et son dentier).

Après cet agglomérat kitsch de clichés SF, j'espère que Bong Joon Ho retrouvera son talent.

 

1e

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Amore

Amore est une sorte de cauchemard pour le critique, en tout cas pour moi. Le film est tellement foisonnant en terme de références, de styles de mise en scène et de propos qu'on passe rapidement du plus grand énervement à une certaine émotion.

Un bon résumé pourrait être de dire que le réalisateur, Luca Guadagnino, a voulu livrer son Guépard : portrait d'une société en déliquescence à travers la chronique familiale d'une grande famille bourgeoise milanaise.

Les thématiques s'enchevêtrent donc sur le mode du "tout fout le camp" : le patriarche meurt, le fils vend l'affaire à des Indiens, la fille découvre son homosexualité, la mère tombe amoureuse façon Lady Chatterley, les pièces rapportées (la femme d'Edo) sont traitées avec une froide cruauté. Tout cela est montré à travers une mise en scène qu'on peut qualifier de pompeuse, voire pompière (ah, le plafond bleu de l'église, ou l'assiette d'écrevisses qui illumine le visage d'Emma), assemblage de très très gros plans, de quasi noir et blanc, de kaleidoscope, d'images floutées, de variation brusque de profondeur de champ, etc.

On passe tour à tour d'un repas filmé à la Desplechin, à une scène typiquement hitchcockienne (la musique de John Adams), en passant par du Pascale Ferran pur jus. Le dernier plan (à voir après un carton de générique de fin, attention) semble même sorti d'Oncle Boonmee.

On s'ennuie par moment, on s'interroge à d'autres et Tilda Swinton arrive à être à la fois énervante, touchante, parfois sublime.

Amore est tout entier tissé de paradoxes, c'est un grand film malade.


2e

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